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La croissance des énergies renouvelables (EnR) en Isère présente des opportunités et des défis significatifs pour le réseau électrique public. Pour aborder ces enjeux, TE38 a organisé une journée d’échanges et de réflexion dédiée à l’intégration des EnR. Cet événement, réunissant les membres du Bureau de TE38 et des experts du secteur, visait à identifier les meilleures pratiques et solutions pour intégrer efficacement les EnR dans le réseau.

L’Isère, terre d’énergie renouvelables

En 2023, le département de l’Isère recense plus de 23 856 installations de production d’énergies renouvelables (EnR), produisant environ 30 % de l’énergie injectée dans les réseaux locaux. L’Isère, territoire riche en ressources naturelles et engagé dans la transition énergétique, offre un panorama diversifié des énergies renouvelables (EnR).
Le département de l’Isère se distingue par sa longue tradition et son expertise dans le domaine de l’hydroélectricité avec des installations majeures situées dans des zones telles que la vallée du Drac et le Vercors. Actuellement, plusieurs centrales hydroélectriques sont en opération, générant une puissance cumulée de 3778 mégawatts (MW).
Le solaire photovoltaïque connaît une croissance rapide dans le département. Les panneaux solaires se multiplient sur les toits des bâtiments publics et privés, ainsi que dans les centrales solaires au sol. Cette expansion, marquée par une augmentation de 30 % entre 2022 et 2023, a ajouté plusieurs dizaines de mégawatts au réseau public, renforçant ainsi l’autonomie énergétique du territoire.
Bien que l’éolien soit actuellement encore peu développé, plusieurs projets sont en cours d’évaluation pour s’adapter aux contraintes géographiques et climatiques locales. Les études préliminaires et les projets pilotes indiquent que plusieurs dizaines de mégawatts supplémentaires pourraient s’ajouter dans les prochaines années.

Cadre et contraintes du raccordement des EnR

Le développement des énergies renouvelables rompt avec le modèle énergétique historique français en favorisant la multiplication d’unités de production décentralisées et de puissance limitée. Pour accompagner cette transition et adapter le réseau électrique à ce nouveau paradigme, la structuration et la gestion du réseau doivent évoluer afin de gérer l’intermittence et la décentralisation de la production.

Les infrastructures existantes sont principalement conçues pour un modèle centralisé de production d’énergie, où l’électricité est générée dans de grandes centrales et distribuée aux consommateurs finaux via des réseaux de transport et de distribution distincts. Les réseaux de transport à haute tension (HTB) et très haute tension (THT), gérés par RTE (Réseau de Transport d’Électricité), assurent la transmission sur de longues distances, tandis que les réseaux de distribution à moyenne tension (HTA) et basse tension (BT), propriété des communes et gérés par Enedis, distribuent l’électricité au niveau local. Avec l’intégration croissante des EnR, il devient nécessaire d’effectuer des ajustements techniques et réglementaires pour garantir la stabilité et la sécurité du réseau face à l’injection intermittente d’énergie.

Les réseaux publics de distribution et de transport d’électricité en France, essentiels pour acheminer l’énergie produite vers les consommateurs, sont régulés par la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE). Cette régulation garantit la sécurité, la fiabilité et l’efficacité de ces réseaux. Pour encadrer le raccordement des installations de production d’énergies renouvelables (EnR), plusieurs lois et régulations ont été mises en place :

  • Loi sur la Transition Énergétique pour la Croissance Verte (TECV) : Fixe des objectifs ambitieux pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et augmenter la part des EnR dans le mix énergétique national.
  • Code de l’énergie : régule le raccordement des producteurs d’énergie renouvelable par le biais de divers décrets et évolutions réglementaires.
  • Loi APER : introduit des mesures spécifiques pour réduire les délais de raccordement, facilitant ainsi l’intégration rapide des EnR.
  • Schémas Régionaux de Raccordement au Réseau des Énergies renouvelables (S3REnR) : planifient les besoins en infrastructures à l’échelle régionale pour accueillir les nouvelles installations de production EnR.
  • La CRE veille à ce que les gestionnaires de réseaux publics, comme RTE et Enedis, respectent leurs obligations de sécurité, d’efficacité et de fiabilité. Elle a introduit des mécanismes incitatifs via le Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Électricité (TURPE) pour optimiser leurs opérations.

Synergie pour les EnR : Enedis, RTE et TE38 en action

Enedis, principal gestionnaire du réseau de distribution, et RTE, gestionnaire du réseau de transport, jouent des rôles clés dans le raccordement et la planification des infrastructures nécessaires pour intégrer les énergies renouvelables (EnR).


RTE élabore les Schémas Régionaux de Raccordement au Réseau des Énergies renouvelables (S3REnR), anticipant et planifiant les besoins en infrastructures pour intégrer efficacement les EnR dans le réseau.

Enedis, quant à lui, est responsable de la quasi-totalité des raccordements des installations de production au réseau de distribution, sous le contrôle de TE38.
En effet, le contrat de concession entre TE38 et Enedis prévoyant la répartition de la maîtrise d’ouvrage, la réalisation des raccordements producteurs est principalement confiée à Enedis. Seuls les raccordements publics ou agricoles, présentant une simultanéité en consommation et en soutirage, avec une puissance de raccordement inférieure à 36 kVA, sont réalisés par TE38. Toutefois, il est rarement observé une simultanéité des sollicitations pour les raccordements en soutirage et en injection.

Afin de répondre aux exigences des engagements d’Enedis prévus au contrat et de faciliter l’intégration des EnR, Enedis, en collaboration avec TE38, a développé une offre de raccordement de référence. Cette offre standardisée est conçue pour être la solution la moins coûteuse pour les producteurs. Elle vise à simplifier le processus de raccordement, minimiser les coûts et assurer la conformité aux normes techniques et réglementaires en vigueur.

Les défis techniques du raccordement

L’intégration des installations de production d’énergies renouvelables (EnR) au réseau électrique public comporte plusieurs défis techniques. Pour assurer une connexion efficace et sécurisée, il est essentiel de maîtriser trois types de contraintes : les contraintes d’intensité, de puissance et de tension.

Les contraintes d’intensité sont liées à la capacité des lignes électriques à transporter le courant électrique. Chaque ligne a une limite maximale de courant qu’elle peut supporter sans subir des dommages thermiques ou provoquer des pertes excessives. Pour gérer ces contraintes, il est souvent nécessaire de renforcer le réseau en augmentant la section des câbles ou en construisant de nouvelles lignes. Une autre approche consiste à répartir les charges en reconfigurant le réseau ou en intégrant des systèmes de gestion intelligente (smart grids) pour optimiser l’utilisation des infrastructures existantes.

Les contraintes de puissance concernent principalement les transformateurs et autres équipements de conversion qui ont une capacité maximale de traitement de l’énergie. Lorsqu’une installation EnR injecte de l’énergie dans le réseau, il est important que les transformateurs puissent gérer cette puissance supplémentaire sans atteindre leurs limites. Pour éviter les surcharges des transformateurs, il peut être nécessaire de les remplacer par des unités de plus grande capacité ou d’installer des transformateurs supplémentaires. La répartition de la charge entre plusieurs transformateurs et l’utilisation de technologies avancées de surveillance et de gestion de la charge peuvent également aider à maintenir les niveaux de puissance dans des limites sûres.

Les contraintes de tension se manifestent par des risques de surtension ou de sous-tension sur le réseau, ce qui peut affecter la qualité de l’électricité fournie et endommager les équipements connectés. Pour gérer les contraintes de tension, des dispositifs de régulation de tension tels que les régulateurs de tension et les compensateurs statiques de puissance réactive (STATCOM) peuvent être utilisés. Ces dispositifs aident à stabiliser la tension en injectant ou en absorbant de la puissance réactive. De plus, les transformateurs à réglage en charge permettent de modifier la tension de sortie pour s’adapter aux variations de charge.

La seule mesure du transit dans un ouvrage n’est pas suffisante pour identifier ces contraintes. Une compréhension approfondie et une anticipation de ces contraintes sont essentielles pour planifier et réaliser des raccordements efficaces et sécurisés.

LE SAVIEZ-VOUS ?

TE38 peut accompagner les collectivités dès les premières réflexions engagées sur un projet EnR en réalisant diverses analyses utiles à la prise de décision. Ces analyses permettent d’optimiser le dimensionnement des installations en tenant compte à la fois des capacités du réseau et des coûts éventuels liés à son renforcement

Exemples

Pour illustrer ces concepts, examinons quelques exemples concrets de raccordements réussis en Isère.

Raccordement de 99 kVA en injection totale :

Description : raccordement au réseau existant sans contraintes ni renforcement.

Travaux : création d’un coffret sur 20 mètres, pose d’une armoire de comptage C4.

Coût : environ 3 000 €.

Raccordement de 100 kVA en injection totale :

Description : nécessite un renforcement du réseau existant.

Travaux : dépose du disjoncteur, création de départs BT, remplacement de conducteurs, création d’une RAS, pose d’une armoire de comptage C4.

Coût : environ 10 000 €.

Raccordement de 115 kVA en injection totale :

Description : impossible sans la création d’un nouveau poste de transformation.

Travaux : pose d’un poste rural compact simplifié, raccordement en antenne sur le départ LANCHA, création d’un départ direct en BTS.

Coût : Environ 15 000 €.

L’analyse des exemples de raccordement révèle une variabilité notable des coûts, influencée par plusieurs facteurs :

Localisation : la proximité des infrastructures existantes peut réduire les coûts de raccordement. Par exemple, le raccordement à Susville, réalisé sans renforcement du réseau, est beaucoup moins coûteux que celui à Miribel Lanchâtre, nécessitant la création d’un nouveau poste de transformation.

Niveau de renforcement nécessaire : les projets nécessitant des renforcements importants du réseau (comme à Chimilin) engendrent des coûts plus élevés, en raison de la complexité et de l’ampleur des travaux nécessaires.

Type de travaux : la nature des travaux (pose de coffrets, création de départs BT, remplacement de conducteurs, etc.) influence directement le coût total. Les projets nécessitant des interventions complexes et étendues sur le réseau entraînent des coûts plus élevés.